Volume 16-2

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Vol. 16-2 – 1994

Regular Issue

Articles

Jocelyne MATHIEU

Présentation

Jean-Claude DUPONT

Introduction

Bien que ce numéro de la revue Canadian Folklore Canadien regroupe un ensemble d’articles qui ne portent pas sur un thème principal, ils traitent tous de la performance et de l’expression de sentiments humains à travers des fabrications matérielles ou des formes verbales. Et cela, en portant aussi bien attention aux  » acteurs  » ou aux agents des produits et performances réalisés, qu’au public récepteur.

Dans  » Les objets d’amour « , je fais une revue exploratoire des objets matériels associés à des manifestations amoureuses positives ou négatives. Ces  » présents « , et autres genres de fabrications auraient une fonction symbolique de préservation ou de destruction, et ils serviraient aussi à transmettre les volontés du donateur. Si certaines de ces pièces étaient de tradition tant chez les autochtones que chez les francophones et anglophones, elles ne traduisaient pas moins des comportements particuliers à chaque groupe culturel.

Dans  » Frances Mateychuk’s Quilts : Mapping a Place « , Susan Shantz, familière avec l’art des textiles, et dont la famille entretient une tradition de la courtepointe, traite de la rencontre qu’elle a faite d’une artisane de la courtepointe qui allait lui faire découvrir de nouveaux aspects de cet art populaire. Frances Mateychuk lui révéla la richesse du  » fortel « , un matériau qui offre une plus grande richesse de couleurs que le coton et qui est plus facile à coudre.

Cet article de Susan Shantz qui introduit à des discussions sur les notions d’art et d’artisanat, comporte beaucoup d’intérêt pour les aspects sociaux et psychologiques qui découlent du travail de l’artisane qu’elle a rencontrée.

Dans  » Topologie, contes et écologie humaine et sociale  » Vivian Labrie amorce une discussion sur l’optique d’égalité épistémologique dans le but de préciser la contribution aux connaissances du conte et de la folkloristique. Dans le passé, on a valorisé les contes aux dépens des conteurs, dévalorisé le savoir qu’ils véhiculaient en les confiant à l’univers enfantin. Il faut se demander quelles thèses sur l’humain, les humains se transmettent-ils par les contes ? Ces thèses sont-elles valables ? Comment peut-on le vérifier ? Vivian Labrie tente de répondre à ces questions d’une manière originale.

Conrad Laforte présente  » La coutume antique et médiévale des couronnes de fleurs retrouvée dans les chansons de tradition orale « . L’antiquité grecque, égyptienne et romaine faisait largement usage de couronnes de fleurs, soit pour le culte des dieux, soit pour les cérémonies religieuses et les sacrifices, soit pour couronner les vainqueur, soit dans les bouquets, repas et festins, soit aux funérailles. Ces coutumes antiques se sont diffusées et la chanson de tradition orale de forme médiévale véhicule toujours ces thèmes et motifs de jadis. L’auteur s’attache particulièrement à décrire le langage amoureux de ces petits poèmes anonymes.

Ranald Thurgood, dans  » You don’t want to buy it, you want to borrow it : Humour in the Prince Edward Island auctioneer’s performance « , décrit l’atmosphère de la vente à l’encan et les manières de s’exprimer des encanteurs. Il montre comment ce discours favorise la vente des marchandises et réussit à retenir l ‘attention de l ‘assistance.

Nathalie Hamel, dans  » J’arrive de quelque part… : les traces matérielles de l’histoire personnelle « , nous fait réaliser comment l’intérieur domestique est le lieu privilégié où l’individu peut s’approprier un espace pour le marquer de sa personnalité, se créer un monde bien à lui. Le choix des objets privilégiés par les occupants est à considérer, puisqu’ils construisent l’identité de ceux qui vivent dans les lieux.

Agathe Gagné-Collard présente une note de recherche portant sur  » Le rapport tradition-mode dans l’idéologie du genre : le cas de la chemise masculine de 1970 à 1990 à Québec « . Pour ce faire, l’auteure a puisé dans la production de la Maison Simons, un commerce au détail implanté à Québec depuis 1840. Elle s’attache particulièrement aux aspects de la taille, du style, de la qualité et de la couleur, et elle relève les grands thèmes publicitaires utilisés pour mettre la production en valeur.

Ce numéro de notre revue montre bien la diversité des préoccupations scientifiques de nos membres et l’effort constant qu’ils mettent pour élargir les horizons du domaine de l’ethnologie.

Jean-Claude DUPONT

Objets d’amour: porte-bonheur et symboles

Les pratiques associées à la manifestation de sentiments amoureux dévoilent la présence d’objets offerts en cadeaux à l’être aimé, ou fabriqués pour décorer le  » nid d’amour « . D’autres veulent venger des amours déchus ou dicter des volontés. La plupart de ces objets ont des significations symboliques et ils jouent le rôle de porte-bonheur.

Susan SHANTZ

Frances Mateychuk’s Quilts: Mapping a Place

La réalisation d’une courtepointe peut être bien plus que la simple fabrication d’une couverture de lit à partir de chutes de tissus. C’est, pour Frances Mateychuk, cette fermière de la Saskatchewan, comme pour bien d’autres femmes du Canada, une manière de traverser les longues heures de l’hiver. À travers le témoignage de Frances, le geste de fabriquer une courtepointe prend tout son sens. Plus qu’un objet utilitaire, la courtepointe peut devenir, au sein d’une communauté, un outil de socialisation avec les voisins, et parfois même un moyen de  » déranger  » les stéréotypes sexuels, lorsque les maris se mettent à coudre, par exemple… Les courtepointes de Frances Mateychuk tracent la carte de sa vie et de son espace. Elles constituent l’héritage qu’elle laissera à sa famille et à sa communauté et par lequel on se souviendra d’elle.

Vivian LABRIE

Topologie, contes et écologie humaine et sociale: des convergences épistémologiques

Au-delà de l’intuition typologique contenue dans la classification des contes populaires d’Aarne et Thompson, le procédé topographique utilisé par certains conteurs pour mémoriser ces récits, qu’ils nommaient aussi  » Contes de traverse et contes de misère « , invite à considérer qu’il s’agit là d’une exploitation originale de la mémoire individuelle dans un contexte oral et collectif pour la production de savoirs valables et complémentaires à d’autres formes d’élaboration. Il autorise aussi à extraire de leurs narrations des itinéraires qui exposent en quelque sorte la dynamique de ces récits. Ces enchaînements de trajets et de métaphores révèlent des lieux communs ou topoi qui se trouvent parfois en correspondance étonnante avec d’autres portions de fiction ou de vie réelle. De la topographie on débouche ainsi sur la topologie, ou science des positions relatives des êtres dans leur environnement, une composante importante de certains courants de pensée modernes en écologie humaine et sociale notamment chez Kurt Lewin et Urie Bronfenbrenner. Une recherche est en cours dans le but de préciser cette contribution possible du conte et de la folkloristique aux connaissances sur l’aide et l’entraide en situation de transition. On en présente ici une première étape, d’ordre épistémologique, qui vise à donner aux contes leur juste place dans l’édifice du savoir humain en tant que théories autonomes de l’expérience humaine élaborées dans la longue durée.

Conrad LAFORTE

La coutume antique et médiévale des couronnes de fleurs retrouvée dans les chansons de tradition orale

Dans la Grèce antique les dieux étaient couronnés. Aphrodite et Vénus portaient la couronne de roses. Dans la plupart des cérémonies rituelles et saisonnières, les couronnes de laurier étaient de mise pour les célébrants et les participants. Nous retrouvons dans les chansons de tradition orale française, une vingtaine de chansons représentées en plus de mille deux cents versions qui contiennent le motif de la couronne de fleurs. Ces couronnes symboliques étaient tressées pour accomplir un rite printanier et principalement celui du passage de l’adolescence à l’état d’adulte, en choisissant ou refusant un amant ou un conjoint. Y aurait-il une analogie entre les couronnes de fleurs de l’antiquité gréco-romaine et celles du Moyen Âge français ? Nous tenterons de la découvrir par l’analyse des vestiges de cette coutume qui se trouve décrite dans les chansons de tradition orale.

Ranald THURGOOD

« You don’t want to buy it, you want to borrow it » : humour in the Prince Edward Island auctioneer’s performance

Cette étude décrit l’atmosphère de la vente à l’encan et les manières de s’exprimer des encanteurs. Elle montre comment ce discours favorise la vente des marchandises et réussit à retenir l’attention de l’assistance. De plus elle essaie de démontrer comment ce discours reflète les valeurs de la culture de l’encanteur et de son assistance.

Nathalie HAMEL

« J’arrive de quelque part... » : les traces matérielles de l’histoire personnelle

Les objets auxquels une personne est attachée, ainsi que leur organisation dans l’intérieur domestique, réfèrent à différentes facettes de son identité. Par les liens qu’ils évoquent avec le passé, avec des personnes et des lieux, les objets significatifs constituent des témoins de l’histoire de vie et rattachent la personne à ses groupes d’appartenance. Les résultats d’une enquête exploratoire tendent à démontrer que l’objet exotique ne fait pas exception et qu’il relie plus la personne à son propre vécu qu’à des personnes appartenant à d’autres cultures.

Agathe GAGNÉ-COLLARD

Le rapport tradition-mode dans l’idéologie du genre: le cas de la chemise masculine de 1970 à 1990 à Québec